48 CHAPITRE IV. solliciter le roi des Bulgares et, ce qui était plus grave, il appela comme auxiliaires les Magyars, qui. à cette époque, venaient de s’établir sur le Danube inférieur. Alamans, Bavarois, Franks, Magyars et Slovènes fondirent à la fois sur la Moravie. Accablé par le nombre, Svatopluk n’essaya même pas de résister ; il renferma ses troupes dans les forteresses et abandonna la plaine aux ennemis qui la ravagèrent durant quatre semaines entières (892)i Les hostilités cessèrent; mais une amitié durable ne se rétablit pas entre les deux adversaires. La guerre recommença l’année suivante; la mort délivra Arnulf de Svatopluk. Toutefois le peuple, qui aime à entourer les grands hommes d’une auréole légendaire, ne voulut pas croire que Svatopluk fût mort comme un personnage ordinaire. Dès le dixième siècle, on racontait un récit merveilleux : une nuit, le grand chef morave avait, sans être vu de personne, abandonné son camp; monté sur son fidèle coursier, il avait gagné sur les tlancs boisés du mont Zo-bor, près de Nitra, un hermitage renommé; là, il avait tué son cheval, enterré son glaive, et était allé se présenter-aux hormites de la montagne: il s’était fait moine et avait longtemps vécu sans faire connaître sa condition; il ne l’avait révelée qu’au moment de rendre le dernier soupir. A travers diverses vicissitudes, son nom resta populaire en Moravie. Encore aujourd’hui, il existe dans ces contrées une locutiou proverbiale : Chercher Svatopluk, c’est-à-dire chercher la justice. Nous avons jugé assez sévèrement ce prince; toutefois il ne faut pas oublier que nous ne le connaissons guère que par les récits de ses ennemis « C’était un vase de perfidie, écrivent les annales de Fulda; il bouleversait les contrées voisines par son avidité et avait soif de sang humain. » « C’était un homme de grand génie et de grande habileté, » écrit Regino. « Il était vaillant, fort et redoutable à ses voisins, » dit de lui Constantin Porphy-rogénète. Les historiens slaves modernes lui assignent un grand rôle dans l’histoire de sa race et signalent en lui le successeur direct de Samo, le deuxième fondateur de l’unité slave en occident.