42 CHAPITRE IV. toutefois les progrès de l’Evangile étaient lents ; le peuple slave, ainsi qu’on l’a vu plus haut, se déliait des prédicateurs allemands; étranger à la culture latine, il ne comprenait ni les sermons tudesques, ni la liturgie romaine. En 852, le concile de Mayence signalait la Moravie comme une terre encore mal dégrossie pour le christianisme : « radis adhuc christianitatis ». Pour q.ue la Moravie pût devenir aisément chrétienne, il lui fallait un clergé national. Le prince Rostislav résolut d’assurer tout à la fois l’indépendance politique et morale de son pays. Il fortifia ses frontières et entra en lutte contre l’empereur germanique; il en sortit victorieux. Assuré de la paix intérieure, il entreprit la conversion régulière de ses états ; c’est ici que se place un des grands ■épisodes de l’histoire de l’église et du monde slave, la mission des apôtres Cyrille et Méthode en Moravie. Les Slaves du bassin du Danube se trouvaient en contact et en rapport avec les deux grands centres de la chrétienté, Rome et Gonstantinople ; le schisme n’avait pas encore éclaté. Mais Rome, malgré tout son zèle, ne pouvait envoyer aux Slaves que des missionnaires étrangers, ignorants ou mal vus du peuple : au contraire, Gonstantinople «tait entourée de Slaves chrétiens qui avaient déjà un clergé indigène. Rostislav s’adressa donc à l’empereur Michel III. Peut-être espérait-il aussi trouver en lui un allié intéressé à balancer la prépondérance des Allemands. « Notre peuple, écrivait-il au césar byzantin, a renoncé au paganisme et accepté la loi chrétienne; mais nous n’avons pas de maître qui puisse nous prêcher la vérité chrétienne en sa langue. Envoie-nous en un. » A Constantinople, vivaient alors deux prêtres déjà célèbres par leur science et leurs missions, les deux frères Constantin, en religion Cyrille et Méthode. Etaient-ils d’origine grecque ou slave ? on ne sait ; mais ils étaient nés à Thessalonique, dans une cité polyglotte où leur père remplissait une haute fonction de l’État. Ils avaient étudié les sciences et les langues, et s’étaient fait distinguer parmi les savants, même à la cour de Byzance. Entraînés par leur vocation religieuse, ils étaient devenus