LA GRANDE MORAVIE. ses armes et à la prédication slave, pouvait se poser en représentant et en défenseur des Slaves vis-à-vis de l’Allemagne. Il ne comprit qu’à moitié ce rôle; il avait pour les étrangers des sympathies qui devaient être funestes à lui-même et à son peuple ; il les attirait volontiers près de lui, et tout en aidant à répandre la liturgie slave dans'ses Etats, il pratiquait lui-même la liturgie romaine; il ouvrit par là la porte aux prétentions du clergé allemand. Il avait commencé son règne par un crime ; il le termina par des fautes; il eut de grands talents, mais un médiocre caractère. Sa politique fut peut-être plus heureuse qu’habile. Pendant un moment, il se trouva être le plus puissant monarque des Slaves : Rome traitait avec lui, la Bohême gravitait dans l’orbite de la Moravie; la Moravie faisait échec à l’empire. En 883, il profita des compétitions qui se produisaient sur ses frontières, dans l’Ostmark, pour intervenir dans les affaires du monde germanique. Arnulf, duc de Pannonie, prêta secours à ses ennemis, et la guerre éclata entre ces deux voisins, tous deux braves, puissants et ambitieux; Svatopluk ravagea à deux reprises, sans rencontrer de résistance, la Pannonie supérieure. D’après la chronique, son armée était si nombreuse qu’elle ne cessait de défiler du lever au coucher du soleil. Charles-le-Gros vint lui-même dans l’Ostmark pour tâcher de mettre fin à la lutte; il reçut en 884 la visite et les hommages de Svatopluk; le prince morave promit de respecter les terres de l’empire. En 888, il conclut avec Arnulf un traité d’al liance et d’amitié. Ce traité fut renouvelé en 891. L’empire de Svatopluk était alors un puissant état ; il comprenait, outre la Moravie actuelle, la Silésie autrichienne, la Bohème vassale, les tribus slaves de l’Elbe et de la Vistule jusqu’aux environs de Magdebourg, une partie de la fra-licie occidentale, les pays slovaques, la Pannonie inférieure. Cependant ces deux ambitieux devaient se défier l’un de l’autre; leur amitié n’était guère fondée que sur une crainte réciproque. Dès qu’il se crut sûr d’avoir des alliés assez redoutables, Arnulf attaqua de nouveau Svatopluk; il s'allia avec un prince slovène, Braclav, -envoya