324 CHAPITRE XIX. ^partisans du roi des Kurucz se dispersèrent, les places qu’ils occupaient se rendirent. La forteresse de Munkacz tint seule, défendue par la femme de Tcekœli, l’intrépide Hélène Zrinyi, dont la poésie hongroise a plus d’une fois chanté l'héroïsme. L’insurrection vaincue, la Hongrie en partie reconquise, il semblait que la clémence fût le premier devoir du vainqueur. Mais Léopold et ses lieutenants ne l’entendaient pas ainsi; une amnistie fut proclamée et violée aussitôt; le général italien Garaffa se fit l’exécuteur impitoyable des vengeances impériales. Établi à Éperies, il institua dans cette ville un tribunal, dont les horreurs rappellent lesplus sanglants exploits des Espagnols dans les Pays-Bas. Pendant trente jours consécutifs, trente bourreaux soumirent les victimes, innocentes ou coupables, aux tortures les plus raffinées, aux plus affreux supplices. La boucherie cl’Èperies comme on l’a appelée, est le plus tragique souvenir de l’histoire hongroise. L’empereur Léopold prétendit, il est vrai, se justifier de ces horreurs, en affirmant qu’elles avaient eu lieu à son insu. ’ Après avoir ainsi terrorisé la Hongrie, il avait le droit d’espérer d’elle toutes les concessions. Jusqu’ici, malgré les persécutions, la royauté était restée élective. Il fallait arriver à la rendre héréditaire. La Diète de 1687, conformément aux vœux du souverain, proclama l’hérédité dans la descendance mâle de la dynastie de Habsbourg. On avait en Hongrie procédé comme en Bohême; d’abord les supplices, ensuite les changements plus ou moins librement consentis du droit public. Le roi dut prêter serment aux lois fondamentales du pays. Toutefois l’article 31 de la Bulle d’or ou constitution d’André II fut aboli; c’était celui qui proclamait le droit à l’insurrection. La Diète, en accordant toutes ces concessions, avait réclamé la fin des supplices et la mise en liberté des prisonniers ; une amnistie générale fut proclamée. Tœkœli s’était retiré en Asie à Nicomédie; Hélène Zrinyi rendit la forteresse de Munkacs.