68 CHAPITRE V. Le faux témoin a le bras coupé ; le meurtrier paye une amende considérable ; toutefois le meurtrier d’un esclave n’est tenu qu’à en restituer la valeur ; le meurtre d’une épouse est tarifé suivant la condition du meurtrier ; un comte paye à la famille de sa femme cinquante jeunes bœufs ; un guerrier dix. C’est faire assez bon marché de la vie humaine. La perte d’un membre coûte plus cher; elle s’expie par la perte du membre similaire ; c’est la mise en pratique du vieux précepte biblique : œil pour œil, dent pour dent ; le rapt se paye dix ou cinq bœufs suivant la condition du ravisseur. Le voleur qui ne peut restituer la valeur de l’objet volé est vendu comme esclave. Ainsi dans cette législation imparfaite se combinent les mœurs chrétiennes avec l’antique barbarie. Les revenus du roi comprennent les contributions des udvornici et du bas peuple, les impôts des villes, le produit des salines et des mines, le monopole de la monnaie, une part à prélever dans les amendes et les compositions, et le droit de se faire héberger chez les particuliers. Le service militaire était obligatoire; personne ne songeait à s’en dispenser; il suffisait pour rassembler tous les guerriers qu’une épée sanglante fut portée par tous les comi-tats; les châteaux étaient le rendez-vous de la noblesse. Les diverses lois d’Etienne forment cinquante-six articles divisés en deux livres. Les idées personnelles dé ce souverain sur les matières du gouvernement se trouvent en outre exposées dans les conseils, qu’il rédigea ou fit rédiger pour son fils Emerich. Ce livre est intéressant à plus d’un titre. Parmi les conseils que le souverain donne à son fils, l’un des plus remarquables semble porter un caractère prophétique. Etienne engage son successeur à bien traiter les étrangers et les hospites : nam unius linguœ uniusque moris regnum imbecille est. Les Magyars du dix-neuvième siècle qui prétendaient imposer leur langue et leur domination aux peuples divers du royaume ont malheureusement oublié ie précepte du roi apostolique.