500 CHAPITRE XXVII. droit historique ou national ; de l'autre, l'aveuglement égoïste qui les empêche de reconnaître chez autrui les-droits-qu’ils réclament pour eux-mêmes. Ce double aspect de leur caractère explique à la fois leurs succès et leurs revers. A partir de 1825, l’esprit public avait fait de grands progrès en Hongrie ; depuis que la langue nationale avait acquis droit de cité à la tribune, les orateurs éloquents étaient nombreux à la diète. L’opposition tenait vis-à-vis du gouvernement un langage bien plus hardi qu’à Vienne ou qu’à Prague: les Wesselenyi, les Deak, les Szechenyi, lesBœthv, les Kossutb, les Eôtvôs, les Teléki, rivalisaient avec les orateurs politiques de Londres et de Paris. Ces hommes éminents joignaient à un sincère amour de la patrie une intelligence sérieuse de ses besoins réels. La session de 1836 fut des plus remarquables : les orateurs de l’opposition attaquèrent vigoureusement le gouvernement qui, passionné pour l’obscurantisme, mettait des entraves aux lois sur l’éducation populaire. « La nation n’a plus à compter que surelle-même, s’écriaient à la fois Deak etBeszeredv. » « Nous avons le droit, nous avons la force, ajoutait ce dernier, de travailler nous-mêmes au salut de notre patrie. » Une fois la diète fermée, Ivossuth entreprit d’entretenir l'esprit public par un recueil périodique où seraient réunies les délibérations des différents comitats; il fut arrêté et jeté en prison avec quelques-uns de ses amis. La table royale ou cour suprême faisait cause avec le gouvernement conservateur; mais chez la jeunesse hongroise, les idées libérales gagnaient chaque jour du terrain. Quelques jeunes gens n'hésitaient pas à se dire républicains. Quand la diète fut ouverte de nouveau en 1840, le gouvernement offrit à l’opposition la liberté des détenus en échange de quelques concessions. Deak, que dès ce moment on nommait le sage du pays, refusa dans un noble langage : « Le devoir envers la patrie est, disait-il, plus grand et plus saint que nos sympathies pour nos amis. Eux-mêmes trouveraient une liberté acquise à ce prix plus cruelle que leurs souffrances. » Une amnistie récoucilia pour un instant l’opposition et le pouvoir : le gouvernement obtint les soldats