22 LE RÈGNE DE JUSTINIEN princes du ve siècle, ses prédécesseurs. Ce parvenu, monté au trône des Césars, a voulu être un empereur romain, et il a été, en effet, le dernier des grands empereurs de Rome. Pourtant, malgré d’incontestables qualités d’application et de goût du travail, — un de ses courtisans l’appelait « l’empereur qui ne dort jamais, » — malgré un réel souci de l’ordre et une sollicitude sincère de la bonne administration, Justinien, par son despotisme ombrageux et jaloux, par sa vanité puérile, par son activité brouillonne, par sa volonté souvent indécise et faible, apparaîtrait au total assez médiocre et mal équilibré, si l’esprit en lui n’avait été grand. Ce paysan de Macédoine a été le représentant éminent de deux grandes idées : l’idée impériale, l’idée chrétienne ; et, parce qu’il a eu ces deux idées, son nom demeure immortel dans l’histoire. Tout plein des souvenirs de la grandeur romaine, Justinien rêva de reconstituer l’empire romain tel qu’il était autrefois, de restaurer les droits imprescriptibles que Byzance, héritière de Rome, gardait sur les royaumes barbares d’Occident, de rétablir l’unité du monde romain. Héritier des Césars, comme eux il voulut être la loi vivante, l’incarnation la plus pleine du pouvoir absolu, et aussi le législateur impec-