Mil INTRODUCTION du cauchemar de la Question d'Orient, lui donnât l’exemple désespéré de l’union et de la coopération qui lui font défaut. On sait comment cette première guerre, après avoir épuisé, semblait-il, tout ce que les belligérants pouvaient prodiguer, de part et d’autre, d’héroïsme et de sang, ne fut que le prélude d’une seconde guerre fratricide entre les Alliés de la veille, et comment cette seconde guerre fut la plus atroce des deux. Beaucoup de nos amis nous ont, dès lors, demandé d’organiser une mission chargée, soit d’intervenir, soit d’être témoin dans cette tragédie... Nous avons refusé d’approuver cette manifestation prématurée, au moins inutile. Aucun des Gouvernements intéressés ne pouvait admettre, en effet, à la suite de son armée, des spectateurs qui seraient des juges indépendants. Mais, la paix enfin survenue, notre réserve n’avait plus sa raison d’être. C’est ce que nos amis américains ont compris quand ils nous ont priés d’agir ; et nous n’avons pas hésité à nous rendre à leur insistance. Les Américains, à la différence de l’Europe, n’admettent pas la résignation, le silence, l’abstention ; ils sont jeunes et ils ne peuvent pas supporter un mal dont il ne leur est pas démontré qu’il est impossible de l’empêcher. Leur impartialité à l’égard des belligérants ne peut être mise en doute ; les Etats-Unis étant la patrie d’adoption de colonies rivales et importantes, notamment d’une admirable colonie grecque. De mon côté, je n’aurais pas accepté la responsabilité d’organiser une mission dont le désintéressement, l’esprit de justice ne m’auraient pas donné toute garantie, •l’aime la Grèce : le souffle de sa Guerre de l’indépendance a inspiré ma jeunesse ; je me suis pénétré des souvenirs héroïques qui vivent dans la mémoire de scs enfants, dans ses chants populaires, dans sa langue que j’ai parlée, dans l’air divin de ses plaines et de ses montagnes, le long de ses côtes où chaque port, chaque bois d’oliviers, de lauriers, évoque les origines sacrées de notre civilisation. La Grèce a été le point de départ de ma vie active, de mes travaux (1). Elle est pour un Européen et pour un Américain, plus qu’un berceau, un temple, un foyer, où chacun de nous rêve de venir en pèlerinage. Je ne me borne pas à respecter et à chérir son passé ; je crois à son avenir, à son intelligence frémissante et presque excessive. Mais, plus j’aime la Grèce, plus mon devoir est de lui dire la vérité et de la servir, comme je sers mon propre pays, tandis que tant d’autres lui nuisent en la flattant. J’ai, pour la Bulgarie et pour toutes les populations opprimées de la Péninsule des Balkans, fait mes débuts d’homme politique, présidé le fameux meeting du Château d’Eau, le 13 février 1903. Celait la belle année de l'agitation pour les grandes causes, pour la justice, pour la liberté, pour la paix ; ce fut le prélude, non officiel mais populaire, de l’entente (1) Y la note de la page suivante.