LA MACÉDOINE GRECQUE 187 « vertébrale, le long de la mer, serait plus faible que si ses frontières s’arron-« dissaient dans un autre sens. Et j'espère que de cette tribune nul n’encoura-« géra à la résistance des populations qui s’inquiètent, qui souffrent... » Attaqué violemment pour ces paroles, M. Vénizelos ajoutait : « Une semblable « déclaration a été faite trois ou quatre semaines après le début de la guerre « libératrice... Dès ce moment-là, j’ai déclaré que je faisais le sacrifice d'une « grande partie de la Thrace hellénique... J’ai cru devoir communiquer cette « déclaration à la Chambre, car... je savais que l’on travaillait à provoquer « un mouvement parmi ces populations grecques qui resteront fatalement hors « de la Grèce agrandie... Ceux qui leur recommandent une pareille attitude « sont les véritables ennemis de la patrie. » M. Vénizelos, cependant, tout en se déclarant contre les menées des organisations patriotiques helléniques en Thrace, dirigées par le clergé, ne disait rien ni de la Macédoine de l’Est, qui entrait dans le tracé ancien de la « formule Delyannis », ni de la Macédoine slave du Sud-Ouest, au détriment de laquelle on espérait évidemment « arrondir » les frontières grecques. En effet, dès ce temps là, on avait déjà parlé, « dans le train Salonique-Monastir », de la frontière commune gréco-serbe, et c’est, évidemment, dans ce sens que M. Vénizelos entendait cette « répartition qui serait signée entre les alliés », dont il parlait à la Chambre. Cette idée d’une « répartition » des territoires possédés en « condominium » commun par tous les alliés s’était déjà substituée à l’idée de 1’ « arbitrage » serbo-bulgare. Quelques jours après la déclaration de M. Vénizelos, le prince héritier Constantin devenait roi de Grèce (fi/19 mars). Les relations entre les occupants grecs et la population indigène ont subi les conséquences de cette évolution. Nous commencerons l’examen de ces relations par la région de Castoria. Dès le commencement de l’occupation, les autorités y faisaient mine d’ignorer jusqu'à l’existence de la population bulgare. La proclamation du prince héritier Constantin, du 14/27 novembre, annonçait, il est vrai, que, dans les régions occupées, les pouvoirs grecs respecteraient la langue et les coutumes religieuses des nationalités. Mais cela ne concernait en rien les Bulgares qui n’étaient, évidemment, aux yeux du pouvoir, que des « Grecs boulgarophones ». On publiait les annonces et les appels à la population en grec, en turc et en juif, tout comme si la langue bulgare n’eût pas existé, et les remontrances bulgares à ce sujet restaient sans réponse. Pour mettre la réalité en harmonie avec cette théorie, l’armée d’occupation eut recours, dès le commencement de ses opérations, à toutes les violences que nous connaissons1. Après avoir suffisamment montré à la population quel sort attendait ceux qui persistaient à s’appeler Bulgares, 011 en 1 Voir chapitre Ier., p. 34 et suiv.