LA GUERRE ET LES NATIONALITÉS les Bulgares ont voulu de nouveau exposer la population de ces pays aux exactions et à la destruction, en essayant d’y envoyer des bandes de brigands pour brûler les villages et piller le peuple. En conséquence, nous déclarons que nous sommes entièrement solidaires de nos frères et de nos libérateurs serbes et que, dans l’avenir, nous travaillerons avec eux, épaule contre épaule, pour fortifier notre patrie, la grande Serbie. Après avoir recueilli, par l’entremise de la police, jusqu’aux signatures des plus obscurs et plus timides habitants, le commandant convoqua les notables. Un vieux marchand, Piperkov, répondit à l'invitation de signer : «Je suis un « vieil homme et j’ai soixante ans. Mon père me disait toujours que mon aïeul « était Bulgare. Nous ne consentons donc pas à signer, et c’est la force seule qui « pourra nous y astreindre. » Le commandant leur donna alors vingt-quatre heures pour réfléchir. Us se rassemblèrent au nombre de onze dans une maison privée. Deux d’entre eux étaient disposés à se soumettre au pouvoir serbe ; mais les neuf autres restèrent inflexibles et furent tous arrêtés. Leurs femmes s’étant adressées aux consulats russe et autrichien, on les remit en liberté en leur doanant un nouveau délai de vingt-quatre heures pour signer. Ils signèrent alors (par leurs noms bulgares finissant en ov, et non pas en its, ce qui était déjà une audace) une-déclaration rédigée par eux-mêmes où ils se disaient « sujets ottomans libérés du régime turc par l’armée victorieuse serbe » et affirmaient qU3, dans l’avenir, « ils resteraient fidèles à leurs libérateurs en ss considérant comme leurs sujets ». La personne qui, à Salonique, nous a conté cette histoire a ajouté que ces pauvres hommes ne pouvaient pas admettre à ce moment que Monastir pût devenir serbe et ne savaient encore rien de l’issue de la guerre. Le io/a3 juillet, on fit venir les maîtres d'école chez le commandant et, sur l’ordre du quartier général, on leur fit la proposition que nous connaissons déjà, à savoir de renoncer à l'exarchie et de devenir fonctionnaires serbes en signant immédiatement des demandes individuelles dans ce sens. On leur pro-mîttait d’augmenter leurs traitements et de tenir compte pour leur retraite de leurs années de service exarchiste. Les maîtres d’école déclarèrent ne pas vouloir forfaire à leur conscience et demandèrent à vivre en simples particuliers et en sujets serbes jusqu’à ce que l’état politique du pays fût décidé. On leur répondit qu'en ce cas, en vertu d'une circulaire du quartier général, ils seraient expatriés le lendemain. On ne fit aucune attention à leur déclaration affirmant qu’ils étaient originaires du pays, que, pour la plupart, ils étaient mariés et avaient des enfants, qu ils avaient des propriétés et d’autres attaches locales et qu’il appartenait à eux seuls de décider librement s’ils voulaient s’expatrier. Ici comme partout, la décision fut irrévocable : que celui qui se nomme lui-même Bulgare s en aille en Bulgarie! La dernière raison qu’émirent les