LA MACÉDOINE GRECQUE 175 § 3. — La Macédoine grecque. En ce qui regarde la Macédoine grecque, la Commission est un peu moins bien documentée que pour la Macédoine serbe. Mais les données qu elle possède suffisent à établir cette conclusion qu’ici encore, la même situation se répète dans les moindres détails, en ce qui concerne les procédés d'assimilation de la population bulgare dans la Macédoine du sud (Vodéna, Ivastoria, Florina). Quant à l’autre système, celui qui consiste à exterminer la population musulmane, il se répète aussi sur la frontière orientale de la Macédoine, aux confins de la Thrace, et il est analogue au système employé par les Serbes sur la frontière ouest, aux confins de l’Albanie. La seule différence, c'est que, dans l’emploi de ces deux méthodes d’assimilation et d’extermination, nous trouvons, cette fois, encore plus de rigueur systématique et encore moins d'humanité. Au surplus, est-ce vraiment une race « humaine », que cette race de « sales » Slaves ? Ce ne sont pas des anthropi. Ce sont des arkoudi, des ours. Le mot revient plusieurs fois dans nos dépositions, et il correspond parfaitement à ce sentiment « bulgarophage » qu’on développait en toute conscience dans l’armée et dans la foule au moyen de ces vers patriotiques et de ces tableaux populaires dont il a été question plus haut1. Commençons par le centre naturel de la Macédoine grecque, Salonique. La Commission d’enquête n’a pas reçu, de la part du Gouvernement grec, de grandes facilités pour s’éclairer sur les faits qui l’intéressaient à Salonique. Pourtant, comme la circulation dans la ville même restait libre, les membres de la Mission en ont profité pour puiser à toutes les sources accessibles. Il est vrai que la population indigène, —grecque et juive, — à quelques exceptions près, s’est dérobée : les Grecs, par hostilité contre la Mission (comme le montrent bien les articles de la presse locale) ; les Juifs, par peur des responsabilités. Mais il restait les étrangers et, bien que le nom même de « bulgare » eût été proscrit, il y avait encore quelques Bulgares attardés. C’est en interrogeant des institutrices bulgares qui allaient s'embarquer le lendemain qu’un des membres de la Mission apprit le détail des journées des 3o juin/ier juillet (17/18 juin, vieux style) qui virent se produire la débâcle bulgare, peu après le commencement de la seconde guerre balkanique. Plus tard, la Mission a pu confronter leurs témoignages avec ceux de divers autres personnages. Enfin, après son retour, elle a reçu les témoignages écrits, très importants, des prisonniers bulgares libérés à la fin de l’année 1913, et ces documents, se joignant aux renseignements oraux, les ont confirmés et corroborés. Parmi 1 Voir chap. II, § 3, p. 77, et les illustrations, ilg. ii et i3.