330 documents relatifs au chapitre deuxième main. Je ne perdis pus connaissance un seul instant. La plus forte douleur que je ressentis fut celle que me causa le deuxième coup de baïonnette. Puis la douleur se lit moins violente. Dans la grande pièce, on tuait en même temps trois nu quatre personnes à la fois, et chaque bourreau avait sa victime. Ici, la pièce étant petite, les autres victimes durent attendre qu’on en eût fini avec moi et furent témoins de mon supplice. Ensuite, comme je n'avais pas perdu connaissance, j’entendis l'homme de Débra refuser d’entrer dans la pièce; il se débattait et voulait arracher la baïonnette des mains du bourreau. Alors, mon bourreau, aidé d’un autre, vint au secours de son collègue et se mit à frapper la victime impitoyablement. L'homme criait : « Oh! que vous ai-je fait? Ne me faites pas de mal! » Enfin, 011 lui saisit les mains et on le jeta sur moi. Je le sentis s’abattre de tout son poids sur mon corps. Ils lui coupèrent la gorge et l'achevèrent en lui donnant plusieurs coups dans le dos. Son sang coula sur moi et mon paletot en fut entièrement trempé. Je sentis le sang chaud qui me coulait sur le corps. 11 mourut instantanément. On amena alors les deux autres. O11 les tua également sur moi et sur l'homme de Débra. Bientôt, les quatre cadavres ne firent plus qu'un tas. Les deux dernières victimes ne se débattirent pas; elles étaient visiblement à moitié mortes de frayeur. Ensuite, on en amena d’autres. Quelque temps après, il se lit un silence morne, pendant lequel je n’entendis que des décharges de canons et de fusils. Quand je compris qu’il n’y avait plus personne dans la maison, je décida de me dégager de dessous les corps qui étaient très lourds et m'inondaient de sang. J'étais resté dans cette terrible position une heure environ. Je sortis avec-peine du monceau des cadavres, je m’assis dans un coin et pansai mes blessures. J’avais trouvé un mouchoir dans ma poche et je le nouai autour de mon cou, d où le sang coulait. Bien que ce fût très douloureux, je pressai fortement les plaies et les pansai avec mon mouchoir; j’essayai de voir si je pouvais me tenir debout; j’y parvins et, voyant que je pouvais marcher, je passai dans 1 autre pièce. Là, je trouvai Christo Dimitrov, de Ghevghéli. Il était assis au milieu de quarante cadavre3 et appuyé contre mur. Il se leva, se mit debout et quand nous nous mîmes à marcher, d’autres encore bougèrent. Christo s adressa a moi en bulgare : « Toi aussi, Georges, tu as pu te lever, tu as eu de la chance. » Nous allâmes auprès de la fenêtre pour voir s’il y avait une sentinelle. Mais nous ne vîmes personne, ni dans la cour, ni près de la porte. Pendant ce temps, les obus et les balles volaient. Un obus tomba près de notre bâtiment et mit le feu à la maison. Nous vîmes que nous risquions de brûler ■vils et nous décidâmes de fuir. Dans la pièce où j avais trouvé Christo, plusieurs hommes se mirent debout et, dans les autres pièces, d’autres en liront autant. Nous nous trouvâmes ainsi etre huit en tout, et nous nous assem-