LE CONFLIT ENTRE LES ALLIÉS 43 la population de Vélès que la ville resterait acquise à la Serbie. Le 3/i6 avril, l’attaché bulgare à l’état-major de l’armée serbe d’Uskub, le major Razsou-kanov, informait son Gouvernement qu’on ne répondait plus à ses demandes, même par des phrases conditionnelles : « C’est provisoire, jusqu’à ce qu’on ait décidé à qui appartiendra tel village... » et cela, même quand il s'agissait des lieux situés dans des rayons de Chtipe ou de Doïran. M. Rozsoukanov apprit que, sur l’insistance de l’état-major, le Gouvernement de Belgrade avait décidé d’arrêter définitivement, comme limite Est du territoire d’occupation, les rivières Zlétovska, Brégalnitsa et Lakavitsa. La correspondance intéressante publiée par M. Balcanicus dans son pamphlet (voir plus haut) se rapporte à l’exécution forcée de cette résolution dans les territoires disputés, pendant le mois de mars. Nous y voyons, d'un côté, les comi-tadjis bulgares conjurant, à l’exemple de l’auteur de la lettre citée plus haut, leur armée d'arriver et tâchant,en son absence, de faire tant bien que mal sa besogne, et, de l’autre côté, l’armée serbe qui établit dans les villages l’administration serbe, ferme les écoles bulgares, chasse les comitadjis et « rétablit l’ordre ». Entre les deux partis, combattant en pleine paix, il y a la population forcée d’opter et qui va naturellement vers le plus fort. M. Razsoukanov (qui nous a renseignés sur les méthodes employées par l’administration serbe pour « arrondir » les frontières du territoire occupé) signale aussi cet état d'esprit comme prédominant dans l’armée d’occupation. Selon lui, « le parti militaire en Serbie, le prince héritier en tête », ne s'arrêtera pas là. Il « rêve et travaille pour une «grande Serbie », avec la rivière Strouma au moins comme frontière». « Pour qu’ils pussent s’assurer la possession des territoires occupés, il fallait que « les Serbes cherchassent un compromis avec les Grecs, et ils l'ont trouvé ». M. Razsoukanov a été ainsi le premier à nous révéler les faits qui sont maintenant confirmés par le « Livre vert » roumain : « En outre du traité conclu « entre les « ligues militaires » des deux pays, dit-il, je suis enclin à croire qu'il « en existe un semblable conclu entre les Gouvernements et les armées. » C’est pour cela que le général Poutnik allait « inspecter » le 9/ 22 mars, la garnison de Monastir, où il y avait à peine un régiment et où le prince héritier était allé aussi, à deux reprises, toujours pour « l'inspection ». On peut croire plutôt que dans le train spécial fourni par les Grecs au général Poutnik, il devait se décider « quelque chose » entre les deux alliés au désavantage du troisième, qui était absent, et que c’était justement ce train spécial Salonique-Monastir, qui était le but de 1’ « inspection du général ». On sait qu’en effet, l’ambassadeur serbe à Bucharest proposait, le 24 mars/6 avril, à la Roumanie, un traité d’alliance contre la Bulgarie, et que, le 19 avril/2 mai, l’ambassadeur grec faisait la même proposition. M. Vénizelos, de son côté, a avoué à la Chambre, que le prince Nicolas — un des interlocuteurs des « trains spéciaux » — avait beaucoup