INTRODUCTION IX cordiale franco-anglaise. Généreuse année 1903 ! Mes amis et moi nous avons répondu sans hésitation au noble effort de croissance, de progrès, de culture matérielle, intellectuelle et morale de la Bulgarie. De même pour la Serbie, que jamais nous n’avons tenue pour responsable des coups de force qu elle a subis ; je compte parmi ses diplomates plus que des collègues, des amis, des caractères de premier ordre qui se sont imposés à l’estime du personnel politique de toute l’Europe. Au Monténégro, dont mes fonctions de membre de la Commission internationale instituée après le traité de Berlin, en 1879-1880, m’ont conduit jadis à délimiter les frontières escarpées, j’ai connu des hommes excellents. Je me garderai de les nommer, s’ils vivent encore, de peur de les compromettre, et je dois dire que je les ai plaints de tout mon cœur, moins pour le tas de pierres dont la destinée avait fait leur patrie que pour le régime qui couronne ce tas de pierres. Les discordes européennes ayant suspendu nos travaux, j’en profitai pour parcourir, en solitaire, la Haute Albanie. J’ai traversé ce pays fertile et désolant de Scutari à Uskub, déjouant la défiance d’Ypek, de Djakovo, de Prizrend, alors en pleine anarchie. Je n’oublierai jamais l’impression de tristesse et d’étonnement que j’ai rapportée de cette aventureuse chevauchée. Tous ces pays voisins de nous étaient alors et sont encore bien autrement séparés et différents de l’Europe que l’Amérique ; on n’en connaissait rien ; on n’en disait rien. C’est à peine si j'osai, à cette époque, publier sans le signer, par respect du secret professionnel ! un aperçu de cette vision restée pour moi ineffaçable (1). Et cependant, toute cette horreur ne cessera pas d’exister tant que l’Europe continuera de l’ignorer. Ces populations entremêlées dans un chaos inextricable de langues, de religions, de races et de nationalités antagonistes, Turcs, Bulgares, Serbes, Serbo-Croates, Serbes de langue albanaise, Koutzo-Valaques, Grecs, Albanais, Tziganes, Juifs. Roumains, Hongrois, Italiens, ne sont ni moins bonnes ni moins bien douées que d’autres en Europe et en Amérique. Celles d’entre elles qui semblent pires ont simplement vécu le plus longtemps dans la servitude et dans l’abandon. Ce sont des martyrs plus que des coupables. Le spectacle de l’enfance abandonnée, dans un pays civilisé, commence à révolter les cœurs les plus endurcis ; que dire de l’abandon de tout un peuple, de plusieurs peuples, en Europe, au xx6 siècle ? Voilà ce que les Américains voudraient contribuer à faire cesser. Qu’ils soient remerciés, honorés, pour leur généreuse initiative : dès longtemps, (1) Macti. Récit de mœurs de la Haute-Albanie, par P.-H. Constant (Revue des Deux Mondes, du 1« mars 1881). V., même revu», p usieurs études sur la Vie de Province en Orèce et. sous ce même titre. 1 vol. in-8*. Hachette, 1878. — Id. : Dionitza, 1878. — Galatée, 1 vol. in-18. Paris. Ernest Leroux, 1878. — Pypmalion, 1 vol., in-18, A. Lemerre, Paris. — Le* Trois Sœurs, texte d’un conte populaire grec, publié dans VAnnuaire de VAssociation des Etudes f/recques. — Id. : Vite de Chypre. — Id. : Lettres inédites de Coray, Superstitions of Modem fïreeee, Nineteenth Century, 1830, r.onires.