04
GRECS ET BULGARES
mission s’est donné pour tâche de comparer les témoignages, fournis de part et d'autre, concernant ces événements et de porter un jugement sur les circonstances qui, jusqu’à un certain point, les expliquent. Les témoignages grecs sont vrais en substance, mais ils n’expriment pas la vérité tout entière.
   Avant de se former une opinion sur la série des violences qui marquèrent la retraite bulgare dans le Sud-Est de la Macédoine, il est nécessaire de se rappeler que les Bulgares occupaient là un territoire dont la population est surtout grecque et turque. Les garnisons bulgares étaient maigres et se trouvèrent en pays ennemi, au début même des hostilités. La population grecque de ces régions est riche et d’un patriotisme ardent. Dans plusieurs centres grecs existaient des organisations d’insurgés (andartcs). On s’était procuré des armes. On assurait que certains chefs de bandes experts se cachaient par là, prêts à enrôler les habitants. Tout cela d’ailleurs est à l’honneur du patriotisme grec : leur race étant en guerre avec les Bulgares, les plus entreprenants et les plus courageux d’entre eux étaient décidés à jouer leur rôle, comme auxiliaires de l’armée grecque, pour chasser l’ennemi du pays. Du point de vue nationaliste, ils avaient moralement le droit d’agir ainsi, d’aucuns diraient même qu’ils en avaient le devoir. Mais, pour les mêmes raisons, il est évident que les Bulgares, partout où ils trouvaient en face d’eux des civils en armes, avaient le droit de prendre les mesures qu’ils jugeaient nécessaires à leur sûreté. Ajoutons, cela dit, que les mesures qu’ils prirent dans certains endroits outrepassèrent terriblement les limites de la légitime défense ou des représailles permises.
LES MASSACRES DE DOXATO
   Doxato était une petite ville florissante, située entre Drama et Davalla, au centre d'un district riche en plantations de tabac. Il y avait là une école importante et plusieurs familles riches et cultivées, vivant au milieu de 2.700 habitants grecs. C’était une ville fière de son caractère hellénique et qui formait, avec deux villages avoisinants, un petit îlot grec compact, au milieu d'une population rurale presque exclusivement turque. Un membre delà Commission en a visité les ruines (fig. 1). Seules, trente demeures restent intactes parmi les 270 maisons grecques. Il en subsiste assez pour montrer que la petite ville était bien bâtie, prospère, et pour donner une idée du cruel dommage qu’ont dû souffrir les habitants. On avait d’abord évalué à 2.000, et les Grecs sont maintenant à peu près d’accord pour évaluer à 600 le nombre des victimes (fig. 2,3 et 4). On nous a communiqué un extrait d’un rapport grec officiel, où le chiffre de 5oo est donné comme un maximum.
   Une forte proportion —probablement la moitié — de ce total étaient des