LA CONDUITE DES BULGARES DURANT LA SECONDE GUERRE 75 Les massacres de Doxato et de Demir-Hissar constituent, avec l'incendie de Serrés, les principaux griefs dont les Grecs aient chargé les Bulgares. Les autres ont trait à des actes de violence isolés, reprochés à des individus qui les auraient commis en maints endroits, sur une grande étendue de territoire. Nous n’avons pas enquêté sur ces cas-là, puisqu’ils renferment rarement une accusation portée contre l'armée dans son ensemble, ou contre un des officiers supérieurs. Nous regrettons de n’avoir pas pu visiter Nigrita, un gros village incendié pendant que la bataille faisait rage tout autour. On assure que beaucoup des habitants ont péri dans les flammes. Il nous paraît convenable d’indiquer, sans exprimer aucune opinion, cette conviction des Grecs que les Bulgares ont incendié délibérément ce village. Nous notons aussi le témoignage, porté par un soldat grec dans une des lettres saisies (voir Annexe n° 51), que plus d'un millier de prisonniers furent massacrés là par l’armée grecque. Nous avons également sous les yeux une déposition signée par un des notables musulmans du district de Nigrita, qui raconte qu’après la seconde guerre, les Grecs chassèrent les Musulmans des villages voisins, avec une violence grossière, sous prétexte qu’ils étaient restés neutres, et s’approprièrent leurs domaines et leurs maisons. Il reste à mentionner l’histoire, tant de fois répétée par quelques-uns des représentants de la Grèce dans les capitales européennes, des doigts et des oreilles de femmes trouvés dans les poches des Bulgares faits prisonniers. C'est à peine s’il est besoin d’insister sur le peu de probabilité que présentent des récits aussi vagues. De pareilles reliques deviendraient vite nauséabondes, et un soldat sur le point de se rendre aurait sans doute soin de se débarrasser d une preuve si évidente de sa culpabilité. La seule autorité qu’on puisse citer en cette matière est celle d’un correspondant du Times. Nous avons vu le personnage en question à Salonique. C’est un journaliste grec, employé par le correspondant du Times. Il tenait le renseignement de soldats grecs et n’avait jamais vu par lui-même ni doigts, ni oreilles. L’état-major grec, qui s’est fait un devoir de publier tous les faits de nature à ruiner la réputation des Bulgares, n’aurait pas manqué de relever cette accusation, avec tous les détails à l’appui, si on avait pu en trouver. Jusqu’à plus ample informé, il faut donc écarter cette légende. Ce qui reste à la charge des Bulgares, après un examen critique des témoignages relatifs à Doxato, à Serrés et à Demir-Hissar, est déjà suffisamment grave. Dans toutes ces circonstances, les Bulgares agirent après avoir été provoqués, et, dans chacun des cas, l’accusation a été exagérée, mais leurs représailles n’en furent pas moins monstrueuses, illégales et disproportionnées. Toutefois, il est juste de faire ressortir que dans ces trois exemples, même interprétés contre eux de la pire manière, rien ne peut confirmer cette affirmation générale de quelques écrivains grecs, que les Bulgares, en évacuant la